RACHEL LICHTENSTEIN & IAIN SINCLAIR
Traduit de l’anglais par Bernard Hoepffner & Marie-Claude Peugeot
Vers la fin des années 1960, un homme, David Rodinsky, disparaît : la pièce qu’il occupait au-dessus de la petite synagogue de Princelet Street, dans le quartier de Whitechapel à Londres, restera intacte pendant plus de dix ans. L’univers de Rodinsky était celui des Juifs d’Europe de l’Est, un monde nourri des mystères de la Kabbale, où les langues et leurs secrets étaient une source inépuisable de magie. Ce monde fut aussi celui d’une perte épouvantable.
Rodinsky capture l’imagination d’une jeune artiste, Rachel Lichtenstein, dont les grands-parents ont quitté la Pologne dans les années 1930 pour s’établir dans l’East End de Londres. Iain Sinclair lui assure : « Cette pièce est un piège. » Sinclair et elle ont écrit un livre qui retrace la quête de Lichtenstein, partie à la recherche de Rodinsky, et nous présente les méditations de Sinclair sur le voyage de la jeune artiste dans son propre passé.
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On peut dire que la disparition de David Rodinsky («ce n’était pas une vraie disparition, parce que personne ne s’en est aperçu», écrit Iain Sinclair) est la métaphore de la disparition des juifs d’Europe, de la Shoah, «cette araignée noire au cœur de la conscience européenne». Rodinsky absent, la chambre devient «une cellule de mémoire» (Sinclair encore). Mais quels chemins la fascination de la chambre de Rodinsky emprunte-t-elle ? En quoi est-ce différent pour Rachel Lichtenstein et pour les collègues artistes, essayistes, écrivains de Iain Sinclair, qui ont été aspirés dans les années 80 par le vortex du 19, Princelet Street ?
Rachel Lichtenstein était attendue par David Rodinsky, explique Iain Sinclair, développant brillamment l’idée du «sujet qui se rend intéressant en devenant une espèce de piège» (par exemple, le sujet choisit le photographe et non l’inverse). À propos de son travail (expositions, installations, qui procèdent par accumulation de reliques), il avance cette définition: «La découverte se transforme en obsession. Les objets conservés se fondent les uns dans les autres et deviennent le corps narratif de l’autre absent, ardemment désiré.» L’enjeu est plus léger pour les visiteurs possédés de fiction et de récits, éblouis par leur recherche du temps perdu et «désireux de prendre contact avec les spectres de ceux qui les avaient précédés»
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