Les capsules de temps sont des objets scellés et enfouis dans la terre à destination des générations futures. Leur tradition remonte à l’Antiquité, à Uruk en Mésopotamie, où l’on avait coutume d’enfouir sous les fondations des constructions des petits artéfacts contenant des messages… Témoignage d’une époque, sauvegarde du patrimoine, telles sont la plupart du temps leurs fonctions.
Depuis plus d’un demi-siècle, sur le continent nord-américain, elles sont devenues un rite de passage pour les adolescents en fin de cycle scolaire. On les trouve aujourd’hui partout dans le monde, sur les chantiers, dans les institutions culturelles, dans les écoles. Elles ont intégré la culture populaire : films, séries-télévisées, dessins animés, bandes-dessinées, mangas…
Que représentent ces bouteilles jetées à la mer ? Ont-elles un véritable intérêt pour les générations futures ou ne sont-elles qu’un symptôme de notre temps présent et de sa crainte de la catastrophe ?
Dans un essai passionnant, Xavier Boissel analyse les enjeux de cet objet « pop », à la portée de tout le monde, de toutes les cultures, de tous les âges et déploie les nombreuses questions que pose cette singulière pratique qui s’est invitée dans notre époque inquiète.
Les archéologues de l’an 8113 sont prévenus : dans ce qu’il restera du sous-sol de ce qui ne sera probablement plus l’université d’Atlanta (Géorgie), 640 000 pages de documents microfilmés les attendent, parfait condensé, sinon de notre civilisation, du moins de l’idée que pouvait s’en faire un pasteur versé dans l’égyptologie, Thornwell Jacobs, qui fit inaugurer en 1940 cette « Crypte de la civilisation » à l’usage de l’humanité censée vivre 6 177 ans plus tard – soit le temps qui le séparait, dans l’autre sens, du début du calendrier égyptien.
Son œuvre est, pour le romancier et essayiste Xavier Boissel, l’emblème de ces « capsules de temps » par lesquelles certains, en majorité aux Etats-Unis, s’improvisent producteurs de traces en enfouissant lettres, livres, films, objets pour témoigner des formes d’existence propres à notre époque, ou nouer un dialogue rêvé avec nos successeurs. Entre catalogue d’initiatives plus ou moins baroques, mais aussi d’expériences artistiques ou technologiques, et réflexion sur l’oubli et le vestige, Xavier Boissel dessine, par des voies apparemment détournées, le portrait d’une société occidentale hantée par la catastrophe et la disparition.